Port Vendres, rendez-vous du côté de chez Swan, un peu maigrichon, un peu palot, quelques cheveux  piqués sur le crâne,  notre « Dave » est  plutôt souriant et accueillant. Ne se contentant pas de son statut d’artiste peintre, il a converti sa galerie en gîte. Des toilettes au fond du jardin, un dortoir un peu spartiate, une cuisine ouverte à tous, de la mosaïque « cache-misère » en veux-tu en voilà, le lieu est original, finalement on s’y sent pas si mal. Une seule chose à ne jamais oublier : baisser la tête en rentrant sinon gare au choc frontal inévitable avec une branche au parcours indomptable !  Pique-nique sur la grande table mosaïquée, tenue de rando enfilée, chaussures adaptées  aux pieds,  tour de chauffe pour les deux jours suivants,  nous  découvrons Collioure par le chemin côtier.

En ce samedi 9 novembre, les ruelles sont  animées, mais une fois que l’on a fait un tour de la cité, que  les un(e)s ont pris le goûter, les autres bu leur boisson préférée,  l’attente pour  le rassemblement paraît  une éternité … sauf pour le petit groupe attardé mais plus futé, qui  tue le temps en visitant le château … et nous, en bas, on fait le poireau !  De retour chez Swan, Paul, notre hôte, s’agite en cuisine où depuis le matin il nous prépare un repas diététique. Dans la très grande salle où sont exposés des tableaux datés de quelques années, l’apéro est festif, d’autant plus que nous sommes cernés par des corps féminins lascifs. Au fond, une grande table sur laquelle  il pose fièrement des poissons aux yeux globuleux vitreux. Leur aspect est peu ragoutant,  pourtant ils sont succulents. Content  de sa recette, il en divulgue ses secrets,  artiste peintre et bon cuistot, chapeau ! Il est l’heure de se coucher, chacun regagne la chambrée où l’espace vital est plutôt  comprimé  … à l’exception d’un couple pour qui le principe du bénéfice de l’âge lui permet d’occuper un espace privilégié !

Les visages sont reposés, malgré la promiscuité finalement la nuit s’est bien passée. Aujourd’hui dimanche, rando linéaire Collioure / Banyuls « tour et balcon de la Madeloc ».  Bon pied, bon œil, la troupe commence à grimper.  Dès le début, il est évident que ça ne va pas être un parcours de santé.  La Madeloc en point de mire, le groupe s’étire. A l’arrière, notre vétéran capitule et redescend par le bitume. Construite pour « surveiller » la mer, la Madeloc  est fière, affalés à son pied nous récupérons les forces laissées dans la montée. Il est à peine 14 heures quand nous entrons dans Banyuls par un quartier complètement délabré. Les flemmards rentrent en car, les pressés à pieds.  Et devinez quoi ? à pédibus ça va plus vite qu’en autobus ! Toujours avec la même passion, notre ami Swan, nous prépare des spaghettis à sa façon. Répondant à l’appel incontrôlable du ballon ovale, nous sommes quelques uns à investir un bar sur le port. Le spectacle n’est pas sur le grand écran, mais devant. Un type complètement givré, plusieurs à la joie rentrée, d’autres aux gestes désordonnés, d’autres encore aux cris animaliers … et au milieu de cet aréopage,  Alain, agenouillé aux pieds de Marie Jo, s’évertue à lui calmer une attaque « crampeuse » sauvage.

Lundi, rando linéaire qui doit nous mener de Banyuls à Cerbère.  Une fois la logistique assurée, poussés dans le dos par de grosses bourrasques de vents, nous tentons de trouver la direction des ruines de la Tour de Carroig. Quelques grains de raisins survivants de la dernière vendange picorés, nous suivons ce balisage jaune qui semble se répandre sur l’ensemble des chemins  du coin. Du coup, nous ne savons pas trop où aller, de toute façon il faut « escalader ». Au loin, sur la mer, les moutons sont de plus en plus nombreux, sur la crête, le vent devient dangereux. Des rafales  à décorner tous les bœufs de la création, nous avançons à reculons ! De tour en ruines nous n’en n’atteindrons point,  ce doit être celle que l’on voit au loin ! C’est dans une clairière abritée du vent, ébouriffés, affamés, que nous nous regroupons pour pique-niquer … enfin pour ceux qui ont de quoi se sustenter puisque Swan a oublié de nous ravitailler ! Par contre, il faut absolument rectifier le trajet  car nous nous dirigeons vers Portbou alors que c’est Cerbère notre lieu d’arrivée. Comme à l’accoutumé, chacun y va de son idée, un groupe éclaireur passe devant, un autre attend, Alain appelle les premiers « revenez, les cerveaux sont là, nous avons trouvé ». Au début, ça a l’air tout bon, très vite ça se gâte,  malgré la croix jaune, nous continuons. La piste disparue, seulement des rangs de vigne ardus,  des escaliers très pentus, certains grognent, nous passons sans vergogne ! Promis juré, plus jamais hors sentier balisé … sauf nécessité !

La bonne humeur retrouvée,  le groupe arrive à Cerbère, les tableaux poussiéreux de Swan se sont animés et dans nos têtes resteront gravés. 

 

Récit d’Annie, marcheuse d’Accro Rando