DEUX ETAPES DE LA HRP (HAUTE RANDONNEE PYRENEENNE)

 Du mardi 08 au jeudi 10 juillet 2014

 

Sortie haute montagne dans les Pyrénées, ce n’est tout de même pas l’Himalaya, pas besoin de sherpa, seulement une dose de volonté et le tour est joué ! ça, c’était avant … après, je vais vous le conter. 

Dix nous étions au départ, en tête du mini convoi, Alain et son fourgon, nous voilà partis pour Luchon. Arrêt obligatoire à Auch, son café, ses chocolatines, la routine pour les randonneurs de passage dans cette contrée. D’ailleurs le patron du bar a reconnu notre chef désigné, il se souvenait de sa tête vue l’an dernier.

Arrêt à Luchon pour louer un supplément de piolets et crampons ! Même pas percuté, pourtant l’évocation de ces appareils aurait dû me mettre la puce à l’oreille. L’organisation est pensée, le fourgon laissé aux Granges d’Astau au bas du Lac d’Oô, ramènera la troupe au départ, au Pont du Prat, là où tout va commencer ! Première énigme, le sac à dos de Claude, tout rikiki alors que les nôtres sont maous costauds ! L’essentiel ne semble pas être dans la quantité, il suffit d’avoir la qualité ! Deuxième énigme, la distribution à chacun chacune de ses crampons et de son piolet qui viennent, bien sûr, alourdir notre fardeau … une question me taraude : à quoi servent-ils pour une rando tranquille ? Est-ce pour faire pro ? le chef n’en fait-il pas trop ? Mi-journée, nous voilà partis pour le refuge du Soula, à 1400 m d’altitude, mise en jambe pour demain où nous devrions atteindre une altitude gratinée, après plus de 1500 mètres de dénivelées. Premiers lacets, deux hommes se laissent distancer, Jean-Marie le distrait vient de s’apercevoir qu’il a oublié son blouson dans l’auto de Jacques. Aussi sec, il rebrousse chemin suivi par le propriétaire qui ne confie ses clés à personne. Nous décidons de ne point les attendre et de poursuivre gentiment notre ascension. Ils nous rattraperont. Arrêt photos à la Vierge, presqu’arrivés, aucun retardataire en vue, où sont-ils passés ? Le refuge du Soula, nos deux amis sont là, goguenards, un raccourci plus des capacités naturelles à grimper ont suffi, nous sommes en retard ! Accueillis par Dédé, un copain de copains à Jacques, nous prenons possession de nos chambrées. En attendant le dîner, bien sûr apéro et belote, et enfin dodo avec pour berceuse le bruit d’un oiseau dans le chauffe-eau ! 

6 h 30, réveil, au petit déjeuner Dédé appelle la météo. Là haut, il ne fait vraiment pas beau ! brouillard, froid … neige ! L’apocalypse en plein été, dans les Pyrénées ! Soucieux de notre sécurité,  Dédé s’assure que nous sommes dotés des outils indispensables à notre survie. C’est charmant mais guère rassurant ! Il ajoute même  « ce soir, je téléphonerai pour voir si vous êtes bien arrivés ». Pourquoi tant de précautions voire d’appréhension ? dans le groupe, il y a des champions aguerris aux sommets pyrénéens … mais il y a aussi des amateurs non  habitués, leur seule volonté « se faire plaisir et surtout ne rien prouver ».  Encore plus conscients des difficultés, 8 heures, nous voilà partis vers les sommets. Premier palier, le lac de Caillauas,  Alain en profite pour tordre ses chaussettes détrempées, ses chaussures ont fait le plein dès le premier gué passé.  Quelques fleurs de rhododendrons, à la surface du lac flottent de gros glaçons, le paysage est sublime, nous sommes tous à fond … enfin, presque ! il faut bien se l’avouer  pour cette étape de la HRP il faut être un montagnard expérimenté. Pour Francis et moi, c’est la première fois que nous voyons des piolets, nous ne savons même pas les tenir encore moins s’en servir … et ne parlons pas des crampons ! Les cairns de la piste se cachent sous les premiers névés, les rochers sont de plus en plus escarpés, les zones d’éboulis de plus en plus étalées  … et par-dessus tout ça des flocons de neige viennent gâcher la luminosité. Il est grand temps de s’équiper, les dévers sont de plus en plus risqués, même si l’on n’en a pas envie, il faut suivre le GPS de Jacques qui indique le tracé au-delà de grands murs de neige glacée  tombant dans les lacs rencontrés, celui des Isclots et du Milieu. A un moment, il faut s’encorder. Alain, en chef héroïque, installe le dispositif, ne regarder que ses pieds, planter son piolet, à la corde s’accrocher, ça y est tout le monde est passé … à peine fini que ça recommence ! Même si quelques uns semblent très frais, les corps commencent à sérieusement fatiguer… il est 15 heures et nous n’avons toujours pas mangé. Une montée de glacier éprouvante, c’est au Col des Gourgs à 2900 mètres d’altitude, que nous nous posons, dans la froidure, pour absorber quelque nourriture … arrosée d’un vin extirpé du « baise-en-ville » de Claude.  Le ciel est toujours aussi bouché, il faut faire vite pour atteindre le refuge du Portillon qui –d’après le GPS- est tout prêt. C’est sûr il n’y a plus à grimper puisqu’il se situe à 400 mètres en contrebas, mais la descente est parsemée de nos chers névés qui ne veulent plus nous quitter ! Re-piolet, re-crampons, re-corde, après plus de 9 heures de progression nous arrivons enfin au Portillon. Dans l’entrée un énorme chien épuisé, un local chauffé avec l’espoir que demain nous repartirons avec des effets séchés, un dortoir dans lequel tous les 10 nous sommes entassés, une douche chaude à jeton bien méritée, une soupe de lentilles et « sucres lents » au  dîner, à peine 20 heures 30 les premiers sont couchés suivis rapidement par les derniers. A 10, la nuit est plutôt calme, les ronfleurs n’ont même plus la force de ronfler ! 

Debout là-dedans, il est 6 h 30, il faut se lever, aujourd’hui nous ne faisons que dégringoler !  Sur le pas de porte du refuge, nous regardons partir vers là d’où nous sommes arrivés un garçon solitaire et son chien, celui qui était dans l’entrée. Deux pattes pansées, il ne veut pas y aller, il hurle à la mort, il n’a pas le choix, son avis canin n’est pas écouté par son maître-chien.  Logique ! en redescendant point de névés, seulement quelques petits couloirs enneigés ! Et bien non, cette année, les passages neigeux sont nombreux et même qu’il faut ressortir la corde et le piolet ! Par temps clair, l’à-pic du mur est impressionnant, heureusement qu’il est étroit, je suis à saturation de grandes sensations ! Réapparaissent les arbres et les rhodos,  le cirque d’Espingo, le Lac d’Oô et sa cascade,  arrêt pique-nique au bord de ce dernier,  premier bilan, nous sommes contents et conscients d’avoir vécu une expérience extrême dans des conditions extrêmes, maintenant plus personne ne pourra plus douter de l’utilité des crampons et du piolet ! D’ailleurs, à ce propos, il a fallu expliquer à quelques personnes qui se moquaient ouvertement de notre attirail, pensant que nous nous la « pétions », qu’à se lézarder au bord du lac d’Oô ils ne pouvaient imaginer les conditions atmosphériques d’en haut.

Les Granges d’Astau, Francis qui n’en revient toujours pas prend en photo ses crampons et son piolet, Josiane libérée nous gratifie d’une étreinte soulagée, le breuvage de la fin de périple absorbé, entassés avec nos sacs dans le fourgon, au risque d’asphyxie, tels des clandestins, le Pont du Prat nous rejoignons.  

Comme dit notre Président « à Accro-Rando, on ne fait pas que de la montagne à vaches, un peu de HRP et après vous savez ce qu’est une sortie haute montagne » .

 

Récit d’Annie, d’Accro-Rando